Dernière modification le 25 septembre 2024 par jeff

triangle de karpman

Vous avez déjà voulu aider votre enfant, et au lieu d’un merci, tout s’est retourné contre vous ? Vous avez consacré du temps, donné de l’énergie, mais il reste insatisfait, et parfois, c’est vous qu’il critique. Déroutant, n’est-ce pas ? Eh bien, vous êtes sans doute pris dans ce qu’on appelle le triangle de Karpman, un jeu psychologique aussi subtil qu’épuisant.

En tant que parent, vous êtes en première ligne de ce piège. Vous voulez bien faire, accompagner votre enfant pour qu’il réussisse. Mais à la fin, cette aide peut se retourner contre vous. Vous risquez de détériorer la relation avec votre enfant, et cela peut créer de la tension. Ce triangle, en plus de saboter vos efforts, pompe votre énergie et déstabilise la relation de confiance que vous essayez de construire avec lui.

Comment ce jeu fonctionne-t-il vraiment ? Et surtout, comment aider efficacement votre enfant sans tomber dans ce piège qui risque de miner votre relation ? La réponse pourrait bien changer votre manière d’accompagner, une bonne fois pour toutes.

Texte & source : le collectif des 7 profils d’apprentissage

 

Qu’est-ce que le triangle de Karpman ?

Imaginez-vous dans la peau du parent dévoué, prêt à tout pour aider votre enfant en difficulté. Vous vous investissez, parfois même au-delà de vos limites, pensant l’aider à surmonter ses obstacles. 

Puis, quelque chose d’inattendu se produit : votre enfant, que vous pensiez soutenir, commence à se plaindre. 

Il est frustré, mécontent, et soudain, vous vous retrouvez accusé de ne pas en avoir fait assez. Votre rôle de sauveur disparaît, et vous devenez… la victime.

C’est exactement là que le triangle de Karpman entre en jeu. Un jour, vous êtes le sauveur, le lendemain, vous vous sentez persécuté, et au final, vous devenez la victime de la situation. Le problème, c’est que vous ne comprenez pas vraiment comment les rôles s’inversent et pourquoi la relation avec votre enfant se détériore aussi vite.

Le plus déroutant, c’est que ce processus est totalement inconscient. Votre enfant ne se lève pas le matin en décidant de devenir une victime, tout comme vous ne choisissez pas délibérément de jouer le rôle du sauveur. Mais sans vous en rendre compte, vous vous retrouvez tous les deux piégés dans cette dynamique.

En 1968, Stephen Karpman [1] a mis en lumière ce triangle relationnel qui, bien qu’ancré dans des intentions positives, finit souvent par briser la relation d’aide. Au départ, votre enfant semble reconnaissant de votre soutien, mais très vite, il devient insatisfait, vous critique, et sans le vouloir, vous réagissez. Et voilà, vous entrez tous les deux dans un cycle perdant-perdant.

Le triangle de Karpman, c’est un peu comme une machine à laver émotionnelle. Au début, tout semble sous contrôle, mais rapidement, les choses tournent en boucle, vous essorent, et au final, tout le monde ressort épuisé. L’enfant, vous, et surtout, la relation qui en souffre.

 

Comment fonctionne ce triangle ?

Le triangle de Karpman est un modèle psychologique qui décrit une relation toxique où trois rôles s’enchaînent sans cesse : le sauveur, la victime et le persécuteur. Ces rôles peuvent changer d’un moment à l’autre, créant une dynamique de frustration et de conflit.

Définition des rôles :

  • Le sauveur : C’est celui qui cherche à aider, souvent de manière excessive, en prenant sur lui la responsabilité de résoudre les problèmes des autres, même sans qu’on lui demande. Il agit par besoin de se sentir utile, mais cette attitude empêche souvent l’autre de se prendre en main.
  • La victime : Elle se sent impuissante face à sa situation. Elle rejette la responsabilité de son problème sur les autres, cherchant constamment de l’aide sans vouloir véritablement changer ou faire des efforts.
  • Le persécuteur : Il critique, fait des reproches, met la pression. Il peut être autoritaire, réprobateur, et fait en sorte que la victime se sente incapable de gérer sa situation toute seule.

 

Lorsque ces rôles se mettent en place, vous vous retrouvez pris dans un cycle sans fin. Ce n’est que lorsque vous en prenez conscience que vous pouvez commencer à en sortir et à rétablir une relation plus équilibrée.

Le triangle de Karpman est un cercle vicieux. Les personnes qui se retrouvent prises dans ce schéma changent constamment de rôle, selon les émotions et les situations. Chacun peut passer du rôle de sauveur à celui de victime, ou devenir persécuteur sans que cela ne mène à une solution constructive.

Exemple 1 –  Le couple en crise

Prenons l’exemple d’un couple. Marie se plaint régulièrement de son travail : « Je ne supporte plus mon patron. » 

Son conjoint, Paul, veut l’aider. Il lui propose des solutions : « Pourquoi ne pas chercher un nouveau poste ? Je peux t’aider à refaire ton CV. »

 Mais Marie, qui se voit comme une victime, répond : « Ça ne servira à rien, personne ne voudra de moi. » Malgré les efforts de Paul pour l’encourager, elle reste négative.

Au fil du temps, Paul se décourage. Il se sent victime de la situation, fatigué de toujours essayer sans retour positif. 

Alors, il change de ton et devient persécuteur : « Tu ne fais aucun effort, tu restes toujours bloquée dans la même situation ! » 

Marie, à son tour, bascule en persécuteur : « Tu ne me soutiens jamais comme il faut ! » Et le conflit continue, chacun revenant tour à tour dans le rôle du sauveur pour apaiser les tensions. Ce cercle infernal se répète, et la crise ne se résout jamais vraiment.

 

Exemple 2 : Relation parent-enfant

Mathieu, adolescent, a de mauvaises notes à l’école. Il dit à ses parents : « Je suis nul, je n’y arriverai jamais. » 

Sa mère, inquiète, adopte immédiatement le rôle de sauveur. Elle fait tout pour l’aider : conseils, professeurs particuliers, aide aux devoirs. Mais Mathieu, dans sa posture de victime, rejette toutes les tentatives : « Rien ne marchera, même les cours particuliers ne m’aident pas. »

Au bout d’un moment, la frustration monte chez la mère. Malgré tous ses efforts, son fils continue de se plaindre et n’améliore pas ses résultats. 

Elle passe alors au rôle de persécuteur : « Si tu faisais plus d’efforts, tu n’aurais pas ces mauvaises notes. C’est de ta faute ! » 

Se sentant attaqué, Mathieu réagit lui aussi en persécuteur : « Tu ne fais que me critiquer, tu ne comprends rien à mes problèmes ! » 

Puis, voyant la situation s’envenimer, Mathieu pourrait tenter de calmer le jeu et redevenir le sauveur en disant : « D’accord, je vais essayer de faire des efforts. » Mais sans un vrai changement, le cycle va se répéter.

 

Exemple 3 – Le bureau toxique

Dans un cadre professionnel, imaginez une collègue, Claire, qui se plaint constamment de la surcharge de travail. 

Elle dit à son manager : « Je ne peux pas gérer tout ça toute seule. » Son chef, voulant bien faire, se met en position de sauveur : « Pas de souci, je vais t’aider à mieux organiser ton temps. Je te donnerai quelques astuces pour être plus efficace. »

Mais malgré ses conseils, Claire continue de se plaindre : « Ça ne sert à rien, je suis trop débordée. »

 Elle passe alors dans le rôle de persécuteur, critiquant son chef pour ne pas l’avoir aidée correctement. 

Le chef, se sentant victime de cette ingratitude, finit par devenir persécuteur à son tour : « Si tu ne fais pas d’efforts pour t’organiser, c’est normal que tu n’y arrives pas. » 

Et la tension continue de monter, Claire cherchant à nouveau à calmer la situation pour éviter que ça dégénère. Mais au fond, rien n’a changé, et le cycle se reproduira encore et encore.

 

Un cercle destructeur

Ce jeu psychologique, bien qu’il paraisse anodin au départ, est en réalité très nuisible. 

Personne ne prend vraiment la responsabilité de la situation, chacun passant de victime à sauveur, puis à persécuteur. Au final, tout le monde se sent piégé dans un conflit sans fin, et personne n’y trouve une issue.

 

Les autres jeux psychologiques

Le triangle de Karpman n’est pas le seul à créer des dynamiques toxiques dans les relations. 

D’autres jeux psychologiques peuvent s’installer dans la relation parent-enfant, sans même que vous ne le réalisiez.

  1. Le “Ball trap”

Vous avez peut-être déjà vécu cette situation avec votre enfant. Il vous demande de l’aide constamment, mais chaque fois que vous proposez une solution, il trouve une excuse pour ne pas la suivre. « Oui, je devrais faire ça, mais ça ne marchera pas pour moi. » 

C’est le fameux jeu du « oui, mais ». Vous avez l’impression de tourner en rond. Chaque tentative pour l’aider se heurte à une nouvelle objection. 

Ce jeu permet à votre enfant de rester dans sa zone de confort, sans avoir à affronter ses vraies difficultés ou prendre des risques.

  1. Le “maître-chien”

Dans ce jeu, c’est souvent le parent qui, pensant bien faire, impose des règles très strictes sous couvert de vouloir le bien de son enfant. 

Par exemple : « Si tu ne fais pas tes devoirs, tu ne sortiras pas ce week-end. » Ou encore : « Plus tard, tu me remercieras pour cette discipline. »

 Bien que les intentions soient bonnes, ce jeu peut rapidement dégénérer en abus d’autorité. Cela peut créer un déséquilibre dans la relation, où votre enfant finit par se sentir étouffé et oppressé plutôt que guidé.

  1. Le “racket émotionnel”

 Ce jeu est parfois utilisé par l’enfant pour détourner votre attention des vrais problèmes. 

Cela consiste à inonder la discussion d’émotions fortes : cris, larmes, rires nerveux… Tout est fait pour éviter d’affronter le fond du problème. 

L’objectif est de fuir la confrontation, qu’il s’agisse des devoirs, d’un comportement à corriger ou d’un problème à résoudre. Et vous, en tant que parent, vous vous retrouvez pris dans cette vague émotionnelle, déstabilisé, sans jamais parvenir à régler le vrai problème.

Ces jeux, bien que souvent inconscients, peuvent saboter la communication et l’apprentissage de votre enfant. Il est essentiel de les reconnaître pour éviter de se laisser entraîner dans ces pièges.

Comment éviter ces pièges ? Quelles solutions ?

Comment ne pas tomber dans ces jeux psychologiques ? Comment stopper cette spirale avant qu’elle ne vous emporte ? Voici quelques solutions pratiques, et des astuces faciles à mettre en œuvre.

Ces dynamiques, bien qu’inconscientes, ne sont pas inévitables. Une fois que vous les identifiez, vous pouvez changer votre manière de réagir et éviter de vous laisser piéger. Voici des pistes pour vous aider à désamorcer ces mécanismes à la maison.

  1. Reconnaître le jeu

La première étape pour sortir de ces jeux est de les identifier. Posez-vous des questions simples : Suis-je en train de vouloir « sauver » mon enfant ? Suis-je frustré parce qu’il ne suit pas mes conseils ? Si vous ressentez une fatigue émotionnelle ou une frustration récurrente, c’est souvent un signe que vous êtes pris dans le jeu. Prenez du recul et observez la situation.

Exemple 1 : Toujours venir à la rescousse

Votre enfant vient vous demander de l’aide, encore et encore, pour les mêmes problèmes. Vous lui avez déjà expliqué plusieurs fois, mais il ne semble pas progresser. 

Vous commencez à vous épuiser et pensez : « Pourquoi ne m’écoute-t-il pas ? » C’est un signal que vous jouez le rôle de sauveur, et lui, celui de victime.

 

Exemple 2 : Ressentir de l’ingratitude

Un autre signe est quand vous vous sentez frustré après avoir aidé votre enfant, et qu’il est insatisfait. Vous passez de sauveur à victime. Par exemple, après avoir passé du temps à lui expliquer une méthode, il vous dit : « Ça ne m’aide pas, je n’y arrive toujours pas. » Vous vous sentez pris au piège et commencez à le critiquer, glissant ainsi dans le rôle du persécuteur.

  1. Passer du sauveur au guide

Ne jouez plus le rôle de sauveur. Une solution est de devenir un guide. Au lieu de faire à la place de votre enfant ou de lui imposer des solutions, encouragez-le à réfléchir et à trouver ses propres réponses.

Exemple 1 : Aider à réfléchir plutôt que donner des solutions

Votre enfant vous dit : « Je ne comprends pas ce texte. » Au lieu de lui expliquer chaque phrase, demandez-lui : « Qu’est-ce que tu as déjà compris ? » ou « Comment pourrais-tu approcher ce passage ? » 

Cela le pousse à réfléchir et à chercher la solution par lui-même, au lieu d’attendre que vous fassiez tout pour lui.

Exemple 2 : Encourager l’organisation

Votre enfant vous sollicite souvent pour de petits détails, comme lui rappeler ses devoirs ou l’aider à préparer son sac. Plutôt que de tout faire pour lui, demandez : « Quelles méthodes pourrais-tu utiliser pour ne plus oublier ? » ou « Comment pourrais-tu t’organiser pour éviter d’oublier tes affaires la prochaine fois ? » 

En l’amenant à trouver ses propres solutions, vous l’aidez à devenir plus autonome.

  1. Reformuler pour responsabiliser

Dans des situations où votre enfant trouve des excuses, utilisez la reformulation pour le responsabiliser.

Exemple 1 : « Je suis nul en maths »

Si votre enfant dit : « Je suis trop nul en maths, je n’y arriverai jamais », vous pouvez répondre : « Les maths peuvent être difficiles, mais cela ne t’empêche pas d’essayer. Qu’est-ce que tu as déjà fait pour t’améliorer ? » 

Vous reconnaissez son sentiment, tout en lui montrant qu’il peut agir pour progresser.

Exemple 2 : « Je n’ai pas eu le temps »

Si votre enfant dit : « Je n’ai pas eu le temps de finir mon projet parce que j’avais d’autres choses à faire, » au lieu de critiquer son manque d’organisation, vous pouvez dire : « C’est vrai que jongler entre plusieurs tâches n’est pas facile. 

Comment pourrais-tu mieux gérer ton temps la prochaine fois ? » Cela l’aide à réfléchir à ses priorités et à prendre ses responsabilités.

  1. Pratiquer l’écoute active

Lorsque votre enfant montre des émotions fortes, ne réagissez pas sur le moment. Accueillez ses émotions sans entrer dans le jeu.

Exemple 1 : L’enfant frustré

Votre enfant, frustré, dit : « Personne ne m’aide jamais, c’est injuste ! » Plutôt que de répondre immédiatement ou de vous défendre, vous pouvez dire : « Je vois que tu es en colère. Qu’est-ce qui te dérange exactement ? » 

Cela permet de calmer la situation et de ramener la discussion à un niveau plus posé.

Exemple 2 : Quand il ne veut pas parler

Si votre enfant se referme et ne parle plus, vous pouvez l’encourager en disant : « Je sens que quelque chose te dérange. Tu veux en parler ? »

Cela montre que vous êtes prêt à écouter, sans lui forcer la main. En général, cette ouverture permet de rétablir la communication.

Transformer le jeu en collaboration

Sortir des jeux psychologiques signifie transformer la relation en une collaboration. Vous et votre enfant devez avancer ensemble, au lieu de vous enfermer dans des rôles fixes.

Quand vous sentez un jeu s’installer, essayez de rétablir l’équilibre avec bienveillance, tout en responsabilisant votre enfant. L’objectif n’est pas de sauver, mais de l’accompagner et de lui montrer qu’il peut trouver ses propres solutions. C’est ainsi que la relation devient saine et que chacun progresse, sans lutte de pouvoir ni frustration.

En appliquant ces stratégies, vous pourrez sortir du cercle vicieux des jeux psychologiques, et la communication sera plus fluide. La prochaine fois que vous sentez le triangle se former, rappelez-vous : Vous n’êtes pas là pour sauver, mais pour guider. Votre enfant, même en difficulté, n’a pas besoin d’un sauveur. Ce qu’il attend, c’est une lumière pour l’aider à trouver son propre chemin. 

 

Sources et références

[1] Stephe n Karpman  « Fairy tales & script drama analysis » 

[2] TAJ-1990-Acey Choy-The Winners Triangle-R https://fr.scribd.com/doc/52446575/TAJ-1990-Acey-Choy-The-winners-triangle-r

https://www.bpdfamily.com/content/karpman-drama-triangle

https://psychcentral.com/pro/recovery-expert/2016/01/breaking-out-of-the-drama-triangle#3

https://www.altercoop.org/blog/les-jeux-psychologiques

 

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